Israël : un puissant endoctrinement

Israël a réagi violemment après l’attaque brutale et inattendue, une série d’attaques terroristes coordonnées visant Israël du 7 octobre par le Hamas. Des deux côtés, des troupes ont été envoyées et des villes entières ont été rasées sous les bombardements. Israël est particulièrement montrée du doigt pour sa cruauté. De nombreuses vidéos choquantes de soldats israéliens riant ou se moquant des dégâts qu’ils produisent, fiers d’eux, sont postées sur les réseaux sociaux. 

Comment un Etat est-il capable de créer une telle haine envers son voisin ? Comment la violence peut-elle être inculquée à un peuple ?

Principalement par l’endoctrinement, le nationalisme et la méconnaissance (probablement volontaire) de l’autre.

L’endoctrinement passe souvent par l’éducation de la jeunesse. Plus une personne est jeune, plus son cerveau est malléable, et n’importe qui peut en faire ce qu’il en veut. 

En Israël, c’est une éducation qui déshumanise les Palestiniens qui constitue la première étape d’un endoctrinement. Aucun manuel scolaire israélien ne représente les Palestiniens comme des humains : ils sont dépeints comme des fermiers primitifs, des hordes de réfugiés ou comme des terroristes. Cela inscrit progressivement dans les cerveaux de la jeunesse que le peuple voisin n’est que menaces et problèmes. Par exemple, dans le livre scolaire La Géographie de la Terre d’Israël édité en 2003, on retrouve des phrases telles que « Les Arabes refusent de faire quoique ce soit pour le bien commun » ou « les Arabes refusent de vivre dans de grands bâtiments ».

Image tirée du livre La Géographie de la Terre d’Israël, éd. 2003, censée représenter un « arabe » « refusant de vivre dans un grand bâtiment ». 

Israël n’est pas le seul à avoir recours à des techniques similaires de désinformation sur l’ennemi. Les élèves palestiniens étudient, à travers des exercices, les violences commises lors de révoltes populaires palestiniennes. La pédagogie palestinienne s’appuie sur des exercices cherchant à créer un sentiment de haine envers les Israéliens et les juifs, voire de l’antisémistisme. Les deux pays utilisent des techniques similaires pour s’aliéner l’un l’autre. Instaurer de tels principes dans la tête de ces enfants, c’est s’assurer une armée engagée. 

Les cartes représentant Israël dans les manuels israéliens ne délimitent pas clairement la Palestine. Il n’y a ni frontières, ni mention de l’existence d’un autre État sur le territoire. Nier une nation engendre une colonisation encore plus dure et violente ainsi que des militaires encore plus révoltés, cruels, sans pitié… 

Dans l’éducation israélienne, la Shoah (l’extermination massive et systématique de juifs par les nazis durant la Seconde guerre mondiale) joue un rôle majeur ; elle est étudiée tous les ans, de la maternelle à la terminale. Cette étude consiste souvent à montrer des images horribles de victimes juives ou des exercices qui visent à ce que les élèves se reconnaissent en elles. Créer un traumatisme et un sentiment de vengeance, c’est le but du Ministère de l’Éducation, selon lequel « chaque israélien est victime de la Shoah ou d’événements futurs similaires à la Shoah ». La vengeance n’est pas envers l’Allemagne nazie et ses alliés de l’Axe mais directement envers les Arabes et les Palestiniens qui sont comparés, mis en parallèle avec les nazis. On peut notamment entendre dans The Friendship Song 2023, une chanson de propagande chantée par des enfants censés dénoncer la violence des Palestiniens, « Planes are bombing […] look the IDF (Israel Defence Forces, c’est à dire Tsahal, l’armée israélienne) is crossing the line to annihilate the swastika bearers »,  en français : « les avions bombardent, regarde IDF traversant la frontière pour annihiler ceux qui portent la croix gammée ». Le clip montre des enfants entre 6 et 12 ans chantant pour la destruction de la Palestine, accompagnés d’images de soldats bombardant ou pleurant leurs morts. Dès le plus jeune âge, Israël enseigne à ses enfants à détester leurs voisins du simple fait qu’ils soient Palestiniens. Les mots « tuer »,  « massacre », et « Palestine », n’y figurent pas mais sont remplacés par « annihiler », « détruire » et « notre ennemi ». 

Après 12 ans dans ce système d’éducation, chaque élève israélien doit faire un service militaire obligatoire. Il dure généralement 2 ou 3 ans et mène les jeunes israéliens à la première ligne d’un Etat d’apartheid colonisateur. Les services militaires riment très souvent avec une montée du sentiment nationaliste, c’est-à-dire un attachement très prononcé pour sa patrie. Les jeunes sont persuadés de faire la bonne chose puisqu’ils ont été formatés  à penser que tous les Arabes veulent la destruction d’Israël. Les Arabes deviennent donc une menace contre laquelle il faut se battre pour conserver « les terres données par Dieu ». Avec ces notions sionistes et nationalistes, les jeunes Israéliens pensent que leur État est en constant danger et qu’il faut le protéger à tout prix. 

Mais qu’est ce que le sionisme ? Le sionisme est un courant de pensée créé par Théodore Herzl au XVIIème siècle, selon lequel il faut créer un Etat pour tous les juifs du monde. Ce courant renaît après la Shoah et certains juifs acquièrent des terres en Palestine puis, le 14 mai 1948, Ben Gourion proclame la création d’un Etat juif sans concerter ni parler aux chefs d’Etats arabes. Une guerre débute le lendemain. 

Malgré la proximité des deux Etats et les nombreuses colonies israéliennes, illégales au regard du droit international, une cohabitation est difficile à cause de l’apartheid mis en place par Israël sur tout le territoire. L’ONU définit en 1973 l’apartheid comme de « graves violations des droits humains spécifiques en vue d’instituer ou d’entretenir la domination d’une groupe racial sur [un autre] et d’opprimer systématiquement celui-ci ». Les Palestiniens sont expulsés de chez eux, ségrégués, séparés par des murs… En 2019, Benyamin Netanyahu, Premier ministre israélien depuis 2009 quasiment sans interruption, dit : « Israël n’est pas un État de tous ses citoyens, mais est l’État-Nation du peuple juif et uniquement du peuple juif ». A cause des lois d’apartheid mises en place par Israel, les Palestiniens ne peuvent circuler librement, ne peuvent participer à la vie politique, ni ne peuvent manifester pacifiquement… Israël contrôle les identités palestiniennes avec 4 types de cartes possibles, toutes contraignantes et discriminantes. Israël interdit notamment à une famille de vivre ensemble si tous les membres ne possèdent pas le même type de carte d’identité.  Par la fragmentation et la dépossession des terres palestiniennes, les autorités israéliennes cherchent à dominer et à contrôler. Cet apartheid est public, et personne ne s’en cache. Cela cause une méconnaissance des deux côtés qui ne peut que créer des rivalités. 

Des vidéos choquantes postées sur les réseaux sociaux sont une preuve de cette méconnaissance et de la déshumanisation. Pour arrêter des membres du Hamas, Tsahal arrête les hommes en masse. Ils les filment ensuite agenouillés, en sous-vêtements, souvent les yeux bandés, en criant des menaces. Ils se filment dans les foyers des Palestiniens, dans leurs canapés par exemple, dans le but de montrer qu’il était facile de s’en prendre à eux. Une tendance a vu le jour sur les réseaux sociaux parmi les soldats : se filmer avec les sous-vêtements de femmes palestiniennes ou les arborant fièrement. Selon certains spécialistes, ces actes consistent en deux crimes de guerre : le pillage et l’atteinte à la dignité de la personne. 

Soldats israéliens posant fièrement avec des sous-vêtements féminins pillés, photo publiée le 9 février 2024 par un soldat israélien sur Instagram, relayée par le journaliste palestinien Younis Tirawi sur X. 

De plus, de nombreuses agressions sexuelles ont été rapportées sur des femmes et des filles Gazaouies et Palestiniennes, à Gaza et en Cisjordanie. 

Certains jeunes Israéliens ont toutefois quitté cet État de mensonge et d’endoctrinement. C’est le cas de Avigail Abarbanel, qui quitte Israël en 1991 pour l’Australie, après son service militaire de 2 ans. Dix ans après, elle se rend compte du lavage de cerveau qu’elle et ses camarades ont subi. Lors de son enfance, il lui a été inculqué que les juifs ne font jamais rien de mal, qu’ils sont toujours « les gentils », qu’ils subissent, qu’ils sont les victimes, etc. Elle n’a jamais connu de mot en yiddish (langue parlée en Israël) pour désigner les Palestiniens, seul le mot « Arabe » existait à son époque. Elle était persuadée, à cause de son éducation, que les Arabes étaient antisémites et voulaient tous détruire Israël. Après avoir rencontré des Arabes et des Palestiniens en Australie, elle s’est rendu compte qu’Israël a tort et que c’étaient « les méchants », « the bad guys » comme elle le dit. Elle renonce à sa nationalité israélienne en 2001 et assimile désormais Israël à un “colonisateur”. 

Amanda Gelenger est un autre exemple, elle est juive de nationalité américaine. Pour elle la prise de conscience s’est faite à l’université lorsqu’un camarade partageant sa religion lui a expliqué « la réalité de la Palestine ». Jusqu’ici, Amanda avait suivi aveuglément ce que sa communauté et sa synagogue lui avait enseigné. Elle a appris qu’un peuple était là avant les juifs malgré les slogans qu’on a pu lui apprendre, comme « Une terre sans peuple pour un peuple sans terre ». Il lui avait été enseigné que « la Palestine, sous quelque forme que ce soit, est antisémite et menaçante. En outre, quiconque critique Israël ne comprend pas ce que l’on ressent lorsqu’on est persécuté en tant que juif. » Elle dit que « même les sionistes de longue date commencent à remettre en question la position israélienne après avoir été témoins d’une violence aussi extrême, comprenant que tuer des milliers de bébés dans des maisons, des écoles et des hôpitaux avec l’argent des contribuables américains ne mènera pas à la sécurité des juifs ». Amanda déclare se sentir trompée par « [les] chefs religieux, [les] familles, les membres de [ses] communautés et nos aînés, qui ont balayé toute une épuration ethnique sous le tapis pour justifier la création d’un État-nation juif violent ».

Une éducation déshumanisante et une montée du nationalisme israélien causée par le service militaire obligatoire ne peuvent que mener à des rivalités et des tensions qui mènent à la guerre. Ces faits expliquent en partie la cruauté de cette guerre et les horreurs auxquelles font face les Palestiniennes et les Palestiniens, les Israéliens et les Israéliennes depuis octobre et depuis 1948.